miercuri, 19 octombrie 2011

L’implantation dentaire sur un os irradié

L’implantation dentaire sur un os irradié, et parfois greffé, chez un patient traité au préalable d’un cancer de la sphère buccaux est controversée. Pour certains, en particulier les Américains, l’irra diation est une contre-indication formelle.
Par contre, une revue de 21 séries publiées essentiellement par des équipes européennes montre que l’implantation est faisable, avec un taux acceptable de complications. Ces données confortent no tre expérience clinique. Les patients rapportent une nette amé lioration de leur qualité de vie.

Beaucoup de néoplasies buccaux, sont traitées par chirurgie et radiothérapie. La radiothérapie impose un assainissement bucco- dentaire préalable, nécessitant des extractions dentaires pour diminuer le risque d'ostéoradionécrose. La réhabilitation den taire par les techniques traditionnelles est alors souvent impos sible, en raison des remaniements anatomiques majeurs qu'ils impliquent. Le but de cet article est d'évaluer, sur la base de données de la littérature et d'observations locales, s'il est raisonnable de recourir aux techniques d'implantologie dentaire sur ce terrain fragilisé, pour corriger les séquelles majeures esthé tiques et/ou fonctionnelles dont souffrent les patients.
L'implantologie débute véritablement avec Bränemark à Göteborg. En 1952, il découvre par hasard le phénomène de l'ostéointégration du titane, réalisant qu'il ne peut plus dévisser une pièce de microscope vissée quelques semaines auparavant dans l'os d'un animal vivant ! Il étudie alors le phénomène «d'ostéointégration», une ankylose osseuse propre au titane, offrant des propriétés mécaniques permettant de créer des structures dentaires implanto- portées, et publie une série magistrale de cas cliniques après vingt années d'expérience.1
Par définition, l'implant dentaire désigne la pièce en titane filetée, vissée dans l'os mandibulaire ou maxillaire, à la place de la racine dentaire. Ce n'est qu'une fois l'ostéointégration terminée, entre six et douze semaines après l'implantation, qu'un pilier est vissé sur l'implant et sur lequel est montée la supra-structure dentaire, dont divers types existent, de simples dents, des ponts fixes, etc.
revue de littérature
L'analyse porte sur 21 séries de cas implantés sur un terrain irradié de 1989 à 2006, représentant 710 patients et 2493 implants.2 Elle vise à répondre aux questions suivantes : 1) l'ostéointégration est-elle possible sur un os irradié ; 2) y a-t-il un délai à respecter entre l'irradiation et l'implantation ; 3) quel est le pronostic de l'implant ; 4) est-il amélioré par l'oxygénothérapie hyperbare et 5) quel est le risque d'ostéoradionécrose ?
Une comparaison rigoureuse de ces publications est difficile, certains paramètres variant même au sein d'une même série, comme la dose et le protocole d'irradiation, le délai entre l'irradiation et la pose des implants, etc. De plus, l'expérience des divers auteurs est variable, allant de cinq3 à 103 cas avec 631 implants.4 Malgré ces réserves, quelques réponses sont possibles.
Le recul moyen est de 4,2 ans (trois mois à 23 ans). Seuls 179 implants (7%) ont été rapportés par des auteurs américains ou japonais, tous les autres étant le fait d'Européens, avec une augmentation progressive du nombre des cas pu bliés chaque année.
L'ostéointégration est-elle possible dans un os irradié ?
Chez l'animal, Schweiger et Tate observent une ostéo intégration identique à celle obtenue du côté non irradié.5-6 Pour Larsen, elle est quantitativement légèrement moins importante.7 L'expérimentation animale montre donc que l'ostéointégration dans un os irradié est obtenue, sans grande différence par rapport à un os non irradié.
Quel délai entre l'irradiation et l'implantation ?
La diminution de la vascularité de l'os et des capacités régénératives ostéocytaires ainsi que l'augmentation de la fibrose sont dose-dépendantes,8 rares en dessous de 45Gy 9 et influencées par le fractionnement de la radiothérapie.10 Cer tains os, comme le frontal ou le zygomatique, semblent plus sensibles aux rayonnements que le maxillaire et la mandibule.11 Ces effets varient au cours des mois qui suivent l'irradiation. Il y a une importante diminution de la vascularité et du remodelage osseux au cours des trois premiers mois après l'irradiation, paramètres qui se normalisent après trois à six mois pour aboutir à un potentiel de remodelage et vasculaire modérément diminué à un an.12 La période favo rable à une implantation dentaire serait donc entre le sixième et le douzième mois.
Les 21 publications font mention de 150 (5,9%) implants posés avant l'irradiation. Implanter avant d'irradier est discutable. L'irradiation d'un implant métallique est amplifiée par diffusion du rayonnement dans son voisinage, par l'effet de backscatter. L'amplification serait de 15% à 0,5 mm d'un implant en titane.13 A ce jour, il n'est toutefois pas possible d'évaluer l'impact sur le risque d'ostéoradionécrose. En plus de ces considérations biologiques, des aspects pra tiques conditionnent aussi le moment de l'implantation. Lors de la découverte d'un cancer buccaux, le traitement onco logique est prioritaire et ne peut être différé dans l'attente d'un traitement implantaire. D'autre part, l'importance de la résection osseuse est décidée au gré des découvertes peropératoires. Ainsi, des implants posés avant le traitement oncologique peuvent être inutilisables en raison des changements anatomiques liés à la chirurgie.
Quel est le pronostic d'un implant sur un os irradié ?
Le taux de succès à long terme du remplacement d'une dent unitaire par un implant chez un patient bien portant est supé rieur à 98%, taux influencé par des paramètres comme le tabagisme, diverses affections systémiques, une parodontite préexistante, l'âge, la qualité et quantité de l'os, etc. Chez le patient édenté, le succès d'un implant dans le maxillaire est légèrement moins bon que celui d'un implant mandibulaire, respectivement de 86,1% à dix ans14 et 91% à cinq ans.15 Le taux moyen de succès de l'implant des 21 articles analysés, sans qu'il soit possible de différencier les implants mandibulaires et maxillaires, est de 87,8%. La plupart des auteurs rapportent des taux de 80 à 100%. La plus grande série avec le plus long suivi indique un taux de 72%,4 mais beaucoup d'implants étaient de première génération dont le pronostic est inférieur à celui des implants plus récents.
Le taux de succès des implants en milieu irradié est donc inférieur à celui d'implants chez des patients non irradiés, mais le pronostic reste bon.
L'oxygénothérapie est-elle utile ?
L'oxygénothérapie hyperbare (HBO) est un traitement pré ventif ou thérapeutique controversé de l'ostéoradioné crose. Des 21 auteurs, cinq l'ont utilisée, de façon non systématique, chez 25 patients (3,5%). Ni ces données, ni les résultats d'une étude prospective,16 ni ceux d'une revue Cochrane systématique17 ne permettent de conclusion.
Le risque d'ostéonécrose est-il plus grand ?
L'ostéoradionécrose est une complication grave qui touche en priorité la mandibule, moins vascularisée que le maxillaire, avec une incidence de 2 à 22%.18 Elle est favorisée par des traumatismes muqueux ou osseux comme une extraction ou infection dentaire, et donc devrait l'être par l'implantation dentaire. Or, des 710 patients des 21 publica tions, seuls neuf (1,3%) ont développé une ostéoradionécrose. Dans seize études, aucun cas n'est rapporté ; dans cinq, l'incidence varie de 1,6 à 12%.19 La plus grande série mentionne une incidence de 2,9%.4 L'incidence est donc relativement basse et ne représente pas une contre-indication formelle à l'implantation sur un os irradié.
discussion
L'implantation dentaire en milieu irradié est controversée. Elle est pratiquée par certains, et contre-indiquée pour d'autres au vu du risque d'ostéoradionécrose. Or l'analyse des cas d'implants sur un os irradié, rapportés dans la littérature, suggère que son incidence n'est pas considérablement plus élevée qu'en terrain sain. Cette observation peut être expliquée par une sélection de cas favorables, ayant moins de facteurs de risque associés, le recours à des techniques chirurgicales d'implantation peu traumatisantes, en anesthésie locale sans adrénaline, avec des incisions et des décollements périostés minimaux, des forages à basse vitesse avec un refroidissement optimal par une irrigation abondante, et un suivi rigoureux. Mais ces résultats ne peuvent pas être extrapolés aux implants osseux extrabuccaux, dont le pronostic est nettement moins bon.4
L'implantation en milieu irradié est donc possible, avec des risques limités, même si elle est difficile. L'anatomie est modifiée par les reconstructions nécessaires après exérèse chirurgicale de la tumeur, avec des lambeaux de tissus mous et des greffes osseuses complexes, un péroné pour la mandibule, par exemple. De plus, l'abord chirurgical est souvent étroit, en raison d'une limitation de l'ouverture buccale. Les soins postopératoires sont aussi difficiles, la xérostomie consécutive aux rayons entraînant une intolérance aux soins buccaux, chez des patients avec d'importants réflexes nauséeux.
L'acquisition d'une nouvelle dentition après de nombreux mois d'édentation constitue souvent une amélioration spectaculaire de la qualité de vie. Toutefois, les implants ne permettent pas de résoudre tous les problèmes. En effet, l'alimentation reste souvent compromise en raison des séquelles liées à la radiothérapie et à la chirurgie, comme la xérostomie, la limitation de l'ouverture buccale, les troubles de la sensibilité et de la motricité locales et la perte du goût.
Les implantations sont cheres ,une prise en charge par l'assurance de base est possible dans le contexte de la maladie oncologique. L'implantologue doit préalablement soumettre un plan de traitement et un devis précis à l'assureur, qui statuera par l'intermédiaire de son médecin-dentiste conseil.

Dr med Karol Chami 8/2011

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